Le vicomte pourfendu **/Italo Calvino
Titre original : Il visconte dimezzato (1952)
traduit en France en 1955
Parti à la guerre contre les Turcs, le vicomte Médard de Terralba se retrouve coupé en deux par un coup de canon. Guérie, sa moitié droite rentre au château et fait régner la terreur dans le village, n'ayant conservé que ses sentiments les plus cruels et mutilant faune et flore en deux. Mais voilà que revient également son autre moitié, faisant l'apologie du bien, bien trop altruiste au goût des habitants. Qu'est-ce qui peut donc sauver la population de ces deux moitiés, l'une et l'autre se révélant inhumaines car moralement situées aux extrêmes ? L'amour peut-être...
"(...) Ce n'est pas moi seul, Paméla, qui suis écartelé et pourfendu, mais toi aussi, nous tous. Et maintenant je sens une fraternité qu'avant, lorsque j'étais entier, je ne connaissais pas. Une fraternité qui me lie à toutes les mutilations, toutes les carences du monde. Si tu viens avec moi, Paméla, tu apprendras à souffrir des maux de tous et à soigner les tiens en soignant les leurs.
- C'est très bien, dit Paméla, mais moi je suis dans un beau guêpier avec votre autre morceau qui est amoureux de moi et dont on ne sait ce qu'il veut me faire." (p. 89)
Il ne fallut pas plus de trois mois à Italo Calvino pour écrire ce conte philosophique durant l'été 1951. Premier volume d'une trilogie dite "trilogie héraldique", il sera publié l'année suivante ; lui succéderont Le Baron perché (1957) et Le Chevalier inexistant (1959). Le narrateur n'est autre que le jeune neveu du vicomte avec qui il a partagé la même nourrice, Sébastienne.
Avec beaucoup d'humour, il nous raconte comment sur les hauteurs du village les Huguenots vivent repliés sur eux-mêmes, ayant perdu et oublié dans leur exil textes sacrés et croyances, mais ne voulant pas côtoyer les autres de peur qu'on cherche à les endoctriner en leur faisant croire qu'il s'agit de leur religion. Ceux-ci haïront la moitié malfaisante du vicomte tout comme ils repousseront sa moitié bienfaisante lorsqu'elle leur demandera de ne plus chercher à tirer profit de leur récolte.
De même, le narrateur dépeint un tableau licencieux du village des lépreux, plus heureux semble-t-il que leurs donateurs placés sous la dépendance du château.
A chaque page sourd ainsi le cynisme, prenant pour cible les médecins, les parents intéressés, les groupes religieux,...
A travers cette fable sur ces deux moitiés d'homme représentant l'un le Mal et l'autre le Bien, l'auteur démontre qu'aucun des extrêmes n'est humain, et, comme le reproche sa nourrice Sébastienne à la moitié gauche, la bonne, croyant faire le bien, se trouve à faire le mal aussi. Ne reste donc qu'à accepter la dualité de nos pulsions et à les tempérer.
CALVINO, Italo. - Le Vicomte pourfendu /trad. de l'italien par Juliette Bertrand. - Paris : Librairie Générale Française, 2009. - 122 p.. - (Le livre de poche. Biblio roman ; 3004). - ISBN 978-2-253-02985-4 : 3,50 €.
traduit en France en 1955
Parti à la guerre contre les Turcs, le vicomte Médard de Terralba se retrouve coupé en deux par un coup de canon. Guérie, sa moitié droite rentre au château et fait régner la terreur dans le village, n'ayant conservé que ses sentiments les plus cruels et mutilant faune et flore en deux. Mais voilà que revient également son autre moitié, faisant l'apologie du bien, bien trop altruiste au goût des habitants. Qu'est-ce qui peut donc sauver la population de ces deux moitiés, l'une et l'autre se révélant inhumaines car moralement situées aux extrêmes ? L'amour peut-être...
"(...) Ce n'est pas moi seul, Paméla, qui suis écartelé et pourfendu, mais toi aussi, nous tous. Et maintenant je sens une fraternité qu'avant, lorsque j'étais entier, je ne connaissais pas. Une fraternité qui me lie à toutes les mutilations, toutes les carences du monde. Si tu viens avec moi, Paméla, tu apprendras à souffrir des maux de tous et à soigner les tiens en soignant les leurs.
- C'est très bien, dit Paméla, mais moi je suis dans un beau guêpier avec votre autre morceau qui est amoureux de moi et dont on ne sait ce qu'il veut me faire." (p. 89)
Il ne fallut pas plus de trois mois à Italo Calvino pour écrire ce conte philosophique durant l'été 1951. Premier volume d'une trilogie dite "trilogie héraldique", il sera publié l'année suivante ; lui succéderont Le Baron perché (1957) et Le Chevalier inexistant (1959). Le narrateur n'est autre que le jeune neveu du vicomte avec qui il a partagé la même nourrice, Sébastienne.
Avec beaucoup d'humour, il nous raconte comment sur les hauteurs du village les Huguenots vivent repliés sur eux-mêmes, ayant perdu et oublié dans leur exil textes sacrés et croyances, mais ne voulant pas côtoyer les autres de peur qu'on cherche à les endoctriner en leur faisant croire qu'il s'agit de leur religion. Ceux-ci haïront la moitié malfaisante du vicomte tout comme ils repousseront sa moitié bienfaisante lorsqu'elle leur demandera de ne plus chercher à tirer profit de leur récolte.
De même, le narrateur dépeint un tableau licencieux du village des lépreux, plus heureux semble-t-il que leurs donateurs placés sous la dépendance du château.
A chaque page sourd ainsi le cynisme, prenant pour cible les médecins, les parents intéressés, les groupes religieux,...
A travers cette fable sur ces deux moitiés d'homme représentant l'un le Mal et l'autre le Bien, l'auteur démontre qu'aucun des extrêmes n'est humain, et, comme le reproche sa nourrice Sébastienne à la moitié gauche, la bonne, croyant faire le bien, se trouve à faire le mal aussi. Ne reste donc qu'à accepter la dualité de nos pulsions et à les tempérer.
CALVINO, Italo. - Le Vicomte pourfendu /trad. de l'italien par Juliette Bertrand. - Paris : Librairie Générale Française, 2009. - 122 p.. - (Le livre de poche. Biblio roman ; 3004). - ISBN 978-2-253-02985-4 : 3,50 €.